La première chambre de Na Bolom est un peu rudimentaire ! Le lit est très large mais un peu court. Il est si large que j’aurais pu y dormir avec au moins deux femmes sans qu’on se gêne, le rêve ! Par contre il est un peu court. Pour être complètement allongé, il faut que je me mette un peu de travers et comme les draps ici sont courts, pour avoir les épaules couvertes, il faut que je sois au moins à 45° ! Là, on se gênerait si on était plusieurs dans le lit, quoique l’on n’aurait pas froid ! Quant au sommier, ce sont carrément des planches, dur pour le dos. Heureusement le matelas est correct. Enfin, découverte du matin : la douche est froide ! Après le déjeuner j’en parle à la réception, et le matin même, ils me changent de chambre. Là, j’ai une chambre très sympathique. Un bon lit, normal, une cheminée avec du bois prêt pour une flambée que je fais le soir même car l’air est frais et humide, des pièces de musée intéressantes en guise de décoration, une douche avec de l’eau chaude. La deuxième nuit fut meilleure que la première.
Le premier jour à San Cristobal est consacré à la visite de la ville. Après avoir réservé une chambre à Palenque pour le lendemain, je pars faire le tour du centre ville, la visite du musée Na Bolom n’est possible qu’à partir de 10h. Je commence par la visite de l’église San Domingo. Les murs intérieurs sont couverts de retables dorés à la feuille d’or. La « chaire de vérité » est taillée dans une seule pièce de bois et dorée à la feuille d’or. Je trouve l’ensemble un peu trop chargé à mon goût. Par contre, la façade est magnifique. Chargée, mais très belle. J’ai eu la chance en arrivant de tomber sur un groupe de touristes belges et allemands accompagnés d’un guide belge qui connaît parfaitement le site. Il met l’accent sur les particularités de cette église assez unique puisque l’on remarque une association de deux ordres : les dominicains et les jésuites.
Après cette visite, je reviens à l’hôtel pour visiter le musée. L’hôtel était comme je l’ai dit la demeure d’un couple d’anthropologues et photographes. Leur maison est maintenant transformée en musée avec quelques chambres qui lui donnent une fonction d’hôtel. Il est fréquenté essentiellement par des chercheurs et par quelques touristes intéressés par l’histoire des indiens. Cela lui donne une ambiance bien particulière, sympathique et conviviale. Certaines pièces sont réservées à la fonction musée et l’on y trouve des photos et des pièces racontant l’histoire de ce couple et de leurs découvertes.
Je pars ensuite sillonner la ville qui a un cachet colonial sympathique mais qui demande un sérieux rafraîchissement. L’état des maisons est assez lamentable et c’est bien dommage car la ville n’est pas mise en valeur. D’après les informations que m’a données Pierre, un restaurateur, les banques ne veulent pas financer les restaurations de bâtiments traditionnels s’ils ne sont pas rasés et reconstruits en béton. Béton qui s’écroule au bout de quelques années alors que ces maisons ont plusieurs siècles et subi plusieurs tremblement de terre sans bouger. La cathédrale a une belle façade, mais l’intérieur ne présente pas de caractère remarquable. On y trouve toujours des statues avec beaucoup de fleurs, des Christ très « martyrisés » et aux cheveux réels. Lors de ma visite, il y a une famille Tzotzil qui est là en prière devant l’autel. La mère exprime à haute voix bruyamment sa souffrance. Je rencontrerai souvent ce genre de manifestation dans diverses églises. Cela est surprenant et émouvant pour un européen. Dans une autre église, les murs et les autels sont couverts de fleurs. Les gerbes et les bouquets sont d’ailleurs magnifiques. Vous pouvez voir les photos dans l’album. Dans cette église il y a une chapelle avec trois statues représentant le Christ : l’un en majesté, l’autre lors de la flagellation et enfin le troisième portant la croix …. C’est assez surprenant !
Après cette promenade, je retourne à l’église San Domingo car il y a là un marché Tzotzil avec de l’artisanat local. C’est haut en couleur et très typique. J’y fais quelques emplettes car il y a de jolies choses et les prix sont vraiment intéressants pour nous. Je n’ose pas marchander car quand on ramène les prix en euros, on arrive à des prix ridiculement bas. Ce sont les vendeurs qui baissent eux-mêmes les prix. J’ai acheté un poncho en vrai laine de mouton à 130 pesos soit 6,50 euros environ.
Dans le guide Lonely planet, j’avais remarqué qu’un français avait ouvert un restaurant. Je vais donc le voir car après trois semaines de cuisine mexicaine, la cuisine française commence à me manquer. Je ne dis pas que la cuisine mexicaine n’est pas bonne, mais les saveurs et les modes de préparation ne sont pas du tout pareils. D’ailleurs, si les familles de Nicolas et Béatrice me lisent, un bon conseil : si vous voulez leur faire plaisir lors de leur retour en France en octobre, faites leur de la bonne cuisine méxicaine !.... euh non…… FRANCAISE, ils en rêvent !!!!
Je fais donc connaissance avec Pierre. C’est un ingénieur des mines qui a parcouru le monde pour divers entreprises internationales, pétrolières d’après ses descriptions. Il s’est finalement arrêté à San Cristobal de las Casas il y a quinze ans, il a épousé une jeune mexicaine et a ouvert un restaurant français. Passionné de bonne cuisine, il a appris à sa femme à faire de la cuisine française et c’est elle qui est aux fourneaux pendant que lui s’occupe de la salle. Elle se débrouille remarquablement bien car je me suis régalé avec une petite ratatouille finement cuisinée, des magrets de canards aux airelles et des pommes à la crème et au miel. Un vrai délice ! Surtout après quelques semaines de tortillas ! (je rigole). Pierre a tout quitté en France, il a tourné une page et s’est construit une nouvelle vie dans ce pays. Il a deux jeunes enfants dont une petite fille de six ans adorable et craquante. Nous avons beaucoup bavardé sur divers sujets. Passionné de bonzaïs, il en avait quatre-vingt en France alors que là il recommence sa collection, il m’a donné quelques conseils, moi qui suis novice en la matière. Nous avons parlé de management d’entreprise, de gestion de production, de bâtiment……. Le métier revient ! Il m’a confirmé les impressions que j’avais en ce qui concerne le bâtiment au Mexique. Il m’a cité comme exemple le pont de la voie rapide qui arrive à San Cristobal. Le pont de Millau fait presque trois kilomètres à plus de trois cents mètres de haut, il est garanti cent vingt ans. Le pont de San Cristobal fait moins de trois cents mètres à quelques mètres de haut, il n’est pas garanti, il s’est écroulé quinze jours avant l’inauguration ! Bref, nous avons passé une soirée très sympathique. Il m’a conseillé sur la Téquila et m’en a fait goûter de la très bonne.
Le lendemain, rendez-vous avec une agence à neuf heures. J’ai prévu d’aller visiter des villages indiens. Malheureusement, le guide conseillé par le Lonely Planet est malade. L’agence me confie donc à une autre agence. Le guide, Cesare, est un métisse d’origine Tzotzil. Ses grands parents sont Tzotzil et il a été élevé dans la culture indienne. Nous sommes un petit groupe de touristes, deux israéliennes, deux mexicains et moi. Cesare nous emmène d’abord à Chamula, un village d’indiens purs et durs. Ils gardent farouchement leurs traditions et n’acceptent les étrangers qu’avec réserves. Il faut se faire très discret. Si on fait un impair, la réaction peut être violente. Même Cesare était sur ses gardes.
Dans ce village, l’église n’est pas reconnue par le Vatican. En effet, il y a un mélange entre les croyances mayas et le catholicisme. Les habitants ont renvoyé les prêtres parce qu’ils veulent imposer les rites catholiques qui ne correspondent pas aux croyances. Un prêtre vient une fois par mois célébrer les baptêmes et repart. Pour le reste, il n’y a ni messe, ni communion, ni mariage religieux.
Nous commençons par faire un tour dans le village et entrons chez une autorité qui a en charge Saint Antoine. Cesare nous explique les traditions dans le local réservé à St Antoine. Dans le village, chaque année, ils élisent 120 autorités. Ces autorités ont à la fois un rôle social et un rôle spirituel. Comme ils vénèrent 80 saints, chaque autorité prend en charge un saint et aménage chez lui un lieu de prière. Là où nous sommes, c’est une pièce de 4m x7m environ. Le long de trois murs, des bancs sont disposés, le long du dernier mur, c’est l’autel du saint. Il y a sa statue et divers objets qui rappellent sa fonction. Cet autel est entouré d’un paravent en plantes vertes suspendues qui cachent un peu le lieu saint. Ce lieu est abrité par un faux plafond en plantes vertes d’un autre type. Ce sont toutes deux des plantes de la forêt et qui ont une signification. Elles sont remplacées régulièrement. Le sol est jonché d’aiguilles de pins qui sont renouvelées chaque semaine. Cela sent bon dans ce local. Devant le paravent, une table sur laquelle sont disposés les instruments du culte : des bœufs en céramique avec 3 logements pour des bougies, un brûlot dans lequel ils font brûler de l’encens ou des herbes équivalentes, du posh (alcool de plante), des bougies de couleurs (blanc, jaune, rouge, noire, vert, multicolore et à la graisse de bœuf). Cesare nous explique le fonctionnement. Chaque saint à une fonction, les mêmes que dans la religion catholique (St Antoine : retrouver quelque chose de perdu, Ste Cécile protéger le chant et la parole, St Christophe protéger les voyageurs, etc….). Régulièrement, l’autorité réunit des habitants qui viennent prier avec lui.
Quand on entre dans l’église, on se rend compte tout de suite de la différence avec l’église catholique. Il n’y a pas de bancs et le sol est jonché d’aiguilles de pins. Le long des murs, des chasses avec des statues de saint s’alignent côte à côte. J’en ai compté près de 47. Le maître autel est réduit aux mêmes fonctions que les chasses. La plupart ont un miroir sur la poitrine. Il y a plusieurs vierges : la Vierge de Guadalupe, la Vierge Marie, La Vierge au chapelet, la Vierge Marie Mineur …… etc. Les habitants ne viennent visiter les saints que pendant 6 jours de la semaine, pas le mercredi car ce jour-là est un jour considéré comme mauvais. Durant leur visite, chaque groupe prie de son côté. Ils amènent des fruits, des légumes, des bougies, des boissons de même couleur que les bougies, des œufs, des poulets, du posh. Ils prient en suivant tout un rituel. Ils font des alignements de bougie selon les intentions en mariant les couleurs, le nombre, le sens des alignements. Pendant leurs prières, ils mangent et boivent. Même les enfants peuvent boire du posch.
La signification des bougies est la suivante :
- Blanc, c’est le nord, la nourriture, les tortillas
- Jaune, c’est le sud, la prospérité
- Rouge, c’est l’est, le sang
- Noir, c’est l’ouest, le mauvais œil
- Vert, c’est le centre, la terre, les récoltes
- Couleurs mélangées, c’est contre les envies, la jalousie
- A la graisse de bœuf, c’est pour la nourriture du Dieu de la terre.
Les quatre couleurs correspondent aux quatre couleurs du maïs : blanc, jaune, rouge et noir. Le maïs est l’aliment de base traditionnel des mayas. Il sert entre autre à faire les tortillas. Le maïs a une place prépondérante pour les mayas et leurs descendants actuels.
Au cours de la cérémonie, un chamane peut être sollicité pour faire une incantation. Avec un bouquet de plantes (souvent des branches de mûrier), avec un œuf ou le poulet, il va faire des incantations autour de son patient en énumérant les saints. A la fin, il va tuer le poulet en lui tordant le cou, casser l’œuf dans le l’eau ou jeter le bouquet de branches par terre et le piétiner. La suite dépend du mal à soigner et de l’intention. Par moment, un homme sort de l’église avec un genre de petit fût de canon, de 40 mm de diamètre et 20 cm de long chargé de poudre noir qu’il fait péter. Un autre fait partir une fusée pétard.
Certains saints ont un miroir sur la poitrine parce que les saints sont promenés de temps en temps, et le miroir sert à renvoyer les rayons du soleil sur les fidèles. Dieu étant le soleil, la lune est la Vierge Marie. Les rayons du soleil en caressant les fidèles, leur apporte la sagesse.
Après cette visite surprenante et intéressante, nous faisons un tour au marché. Puis Cesare nous emmène dans un autre village indien, Zinacantan. Dans ce village Tzotzil aussi, les indiens ont évolué. Ils reconnaissent l’église de Rome et sont normalement évangélisés. Ils gardent cependant quelques pratiques traditionnelles chez eux. Cesare nous a emmené dans une famille qui fait du tissage avec un métier à tisser de ceinture, comme les mayas autrefois. Elle nous a bien accueillis et Cesare nous a fait visiter leur coin prière où il nous a fait des démonstrations. Puis il nous a fait visiter leur cuisine où nous avons vu la même meule à maïs que sur les bas-reliefs mayas et dans les musées.
Cette visite était passionnante car Cesare, possédait parfaitement son sujet, ayant été élevé dans ces traditions. Attaché à cette culture, tout en en reconnaissant les limites, il défend ces peuples en appelant au respect.
De retour à San Cristobal, je me dirige vers la gare routière. Un bus part à 15h30 pour Palenque et il y a 5h de route à travers le Chiapas. Au cours du voyage, nous remarquons parfois des postes de surveillance militaires dans le genre de ceux que je voyais enfant en Algérie, avec des sacs de sable. J’apprendrai les jours suivants que des touristes ont été arrêtés soit par des zapatistes, soit par l’armée. Les uns ont demandé de l’argent, les autres ont effectué des fouilles. Nous, nous sommes passés sans encombre. Le paysage est magnifique. Sans les bananiers ni les bougainvilliers, on se serait cru dans les Vosges, le Jura ou la Suisse.
A Palenque, j’ai réservé une chambre à l’hôtel Xibalba. Dans la religion maya, Xibalba est le nom du monde souterrain dirigé par les dieux de la mort et de la maladie. Le mot Xibalba signifie « lieu de la peur » ou « lieu des fantômes ». Xibalba est décrit dans le Popol Vuh comme un endroit sous la surface de la Terre. Le Popol Vuh est la bible des Mayas, il décrit aussi la route de Xibalba (qui était considérée par les mayas comme la partie sombre de la Voie lactée). L’hôtel est pourtant bien sympathique, propre et clair. Mais on sent que l’on n’est pas en haute saison, je suis le seul client. Je passe une bonne nuit de repos.
samedi 3 octobre 2009
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2 commentaires:
Bonjour,
nous venons de regarder l'album de photo : plus besoin d'y aller, on a déjà tout vu! et dans les détails... manquent l'odeur, les sons, la chaleur..
impressionnés par les architectures vacillantes; les couleurs éclatantes des vêtements (essaie de savoir à partir de quoi ils les teintent, stp); le vert chlorophyllé des pelouses! les sculptures antiques, waouh.
en revanche, le goût en effet très...hispanisant? chargé? baroque? (kitsch?) du reste; on n'a pas l'habitude. sauf pour ceux qui auront été au Pilar de Zaragoza.
on vient de lire un bouquin sur Diego Riviera et Frida Calo : intéressant de pouvoir voir les peintures, merci.
bonne continuation; bisous, en attendant la suite.
j'essaie de me rappeler... voyons, voyons... dans mon enfance, quelqu'un me parlait de balzac... de ses loooooongues descriptions... qui était-ce déjà ? ;)
hé, hé !
merci, c'est sympa d'avoir ainsi de tes nouvelles.
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