dimanche 28 mars 2010

Conques à Condom

Mon récit précédent s'est terminé brutalement car étant à l'office du tourisme de Conques, j'ai dû m'arrêter brutalement au moment de la fermeture.

La nuit à Golinhac a été paisible. Comme durant la journée je ne dois pas traverser de village avec commerces, j'attends l'ouverture de l'épicerie pour acheter un casse-croûte. Le temps est superbe, un beau soleil réchauffe l'atmosphère. Le chemin jusqu'à Conques est plus facile que la veille. Arrivant à 15h30 à Conques, cela me donne le temps de visiter le trésor de la basilique et le musée, puis de squater l'ordinateur de l'office de tourisme afin de mettre à jour mon blog, et enfin de faire un tour dans le village. Cette petite cité médiévale est magnifique et bien restaurée. Je suis accueilli à l'abbaye par des hospitaliers bénévoles. Au repas, j'ai la bonne surprise de retrouver Alain qui arrive d'Estaing. Il n'est pas passé par Golinhac, il a pris une variante plus facile, mais a quand même fait près de 40km dans la journée. Le repas avec les hospitaliers est très sympathique, chaleureux. Les échanges sont riches. Comme chaque soir, nous échangeons des messages avec Caroline. Comme la liaison téléphonique n'est pas bonne, nous communiquons par sms:
- Caroline: "jcapte que dalle! on s'appelle 2m1 soir. A Conques jdevrais avoir du réseau! Ca sera plus simple. J'espère que tt va bien pr toi."
- moi: "Pour moi tvb. J'espère que tu n'en as pas trop bavé aujourd'hui. demain ce sera plus cool. conques est très joli. Alain est arrivé jusqu'ici. demain il ira probablement comme moi à Livinhac. A demain"
- Caroline:"Mais il est fou!! Il s'est fait plus de 40km dans la journée! Je suis fier de vous, vs avez un super rythme. Jvous appelle 2m1 pour faire le point"
Au cours de nos marches et de nos soirées dans les gîtes, nos échanges sont devenus de plus en plus profonds, créant entre nous une certaine complicité, une amitié. Alain et moi avons pris Caroline en affection, elle nous appelle ses petits papas.
Après une bonne nuit de repos, nous profitons de notre présence à l'abbaye pour bénéficier des laudes, puis de la messe. A l'issue, nous recevons de la part d'un des pères, la bénédiction du pèlerin devant l'autel de Ste Foy. Nous déjeunons ensuite avec les hospitaliers. Pendant qu'Alain visite un peu Conques, je passe à la poste pour m'alléger des vêtements d'hiver et je reprends le chemin. Il commence par une montée raide vers la chapelle Ste Foy qui nous donne une vue splendide sur Conques. Le temps est superbe et je prends mon casse-croûte de midi devant la chapelle St Roch de Noihlac. Jolie petite chapelle avec de beaux vitraux modernes mais chatoyants. Le chemin reste en crête jusqu'à Decazeville où la descente et la remontée sont rudes. Je fais étape chez "Corinne la pèlerine" (Dioscore) près de l'église St Roch. Comme elle était à Conques, nous l'attendons une heure au soleil avec Alain qui vient de me rejoindre. Nous avons des échanges profonds. Je lui relate l'agonie et le décès de mon père qui nous a beaucoup marqué par sa profondeur spirituelle. Quand Corinne arrive, nous allons prendre notre douche chez le curé d'en face car Corinne a des problèmes de douche. Elle nous fait un excellent repas bio et les échanges au cours du repas sont riches et profonds.
Le lendemain, nous faisons nos courses à Livinhac et nous reprenons la route chacun de notre côté. Mais avec nos arrêts respectifs, nous nous suivons de peu et nous retrouvons de temps en temps. Ces moments de solitude nous permettent chacun de réfléchir, méditer et prier. A midi, nous nous retrouvons au pied de l'église de St Félix, jolie petite église du XI° siècle très curieuse. Nous pique-niquons au soleil sur des bancs. L'après-midi nous cheminons ensemble jusqu'à Figeac. Là, Alain va visiter le musée Champolion, très intéressant, pendant que je fais un tour dans les ruelles moyenâgeuses et à l'église St Sauveur qui a une superbe chapelle avec des boiseries peintes représentant des tableaux de la bible. Je prends ensuite le chemin qui remonte sur le plateau par le "Cingle". J'y rencontre deux jeunes élèves de terminale. Ils m'offre gentiment du chocolat et nous échangeons pendant un moment bien sympathique. Je reprends ensuite jusqu'à la Cassagnole où Alain me rejoint. Nous sommes chaleureusement accueillis par Marie-Claude qui nous installe dans un gîte avec coin cuisine. Pendant que je lance la lessive avec elle, nous avons ensemble un échange profond. Alain et moi achetons quelques provisions et nous préparons notre dîner que nous partageons en échangeant. Alain fait peu à peu un cheminement intérieur qui l'émerveille. Par téléphone nous avons Caroline qui nous suit une étape derrière et nous convenons de nous retrouver à Moissac d'où ils partiront ensemble pour Paris.
Après une nouvelle nuit de repos, nous repartons à travers le plateau du Quercy sec et désertique. Nous apercevons de nombreuses casettes (huttes de bergers en pierre) et quelques dolmens. Je n'ai pas suivi le chemin que j'ai préparé, mais le GR et je le regrette. Nous arrivons au dessus de Cajarc avec une jolie vue sur la ville. Nous passons par la poste où je m'allège encore un peu, le temps étant de plus en plus beau et chaud. Nous nous installons au gîte municipale qui est propre et confortable. Quelques courses nous permettent de faire quelques provisions pour notre dîner et notre déjeuner du lendemain. Nous échangeons encore et je suis touché de voir l'émerveillement d'Alain à se laisser transformer et cheminer.
L'étape du lendemain nous amène à travers de longues forêts et des chemins bordés de murs de pierre jusqu'à Vaylats au couvent des Filles de Jésus. Après la douche, lessive et courses, nous suivons les vêpres de 18h puis nous partageons le souper avec les soeurs et un hospitalier bénévole qui est là en convalescence.
Le lendemain, nos routes se séparent car je file vers Cahors alors qu'Alain coupe en direction de Lascabanes. J'arrive à Cahors vers 14h30 et galère un peu pour trouver un hébergement car beaucoup sont fermés. L'office de tourisme me trouve quelque chose au foyer des jeunes travailleurs. Ma soeur Hélène arrive par le train et nous nous retrouvons. Après notre installation et ma douche, nous faisons une petite visite de la vieille ville puis nous allons à la messe à l'église St Barthélémy. Nous dînons dans une brasserie avant de rejoindre le foyer.
Après une bonne nuit de repos nous prenons le chemin de Lascabanes sous un ciel plutôt humide. Nous passons par le pont de Valendré, superbe! En arrivant en haut de la côte nous sommes obligés de nous couvrir de nos ponchos. Le chemin a été modifié pour passer devant un gîte et c'est là que nous voyons que les GR ont un côté économique plus que de tradition. En passant par ce gîte, comme nous cherchions des toilettes, nous sommes gentiment invités à boire un café. Le chemin est boueux, nous marchons sous le vent et la pluie. A midi, nous nous abritons sous un porche d'école pour casser la croûte. Comme nous sommes près d'un bureau de vote, plusieurs citoyens passent bavarder un peu avec nous. Nous repartons mais le temps se lève un peu, la pluie s'arrête. Hélène marche à son rythme et je règle le mien sur le sien. A deux kilomètres de Lascabanes, elle commence sérieusement à fatiguer. Là, Caroline qui a suivi le même chemin qu'Alain nous rejoint. Nous arrivons au gîte où nous nous installons. Après la douche, à 18h, nous sommes accueillis à l'église par le père Kerveillant, prêtre ouvrier de la mission de France, ermite à Lascabanes, veilleur sur le chemin. Il nous accueille par le lavement des pieds, comme le Christ, et l'eucharistie. C'est un moment assez fort. Nous retrouvons ensuite l'hôtesse du gîte avec son doux sourire. Elle nous a préparé une excellente soupe et un poulet au vinaigre succulent. Après le repas, je passe un moment à échanger avec Caroline qui elle aussi chemine intérieurement.
Le lendemain, nous démarrons tous les trois ensemble, mais à un moment, Caroline bifurque vers Moncuq alors qu'Hélène et moi continuons sur le plateau. Comme elle fatigue vite, je prends un raccourci et évite les dénivelés. Le temps est variable, mais nous évitons la pluie et le temps s'améliore peu à peu. A midi nous retrouvons Caroline près de Montlauzun. Nous déjeunons avec un chien très gentil mais un peu collant. Il se couche souvent sur les pieds douloureux d'Hélène. L'après-midi nous continuons ensemble et à quatre kilomètres de Lauzerte, Alain arrive à notre rencontre. Après avoir avancé un peu, il a fait demi-tour pour nous rejoindre. Nous arrivons au gîte de Lauzerte où Bernadette et Michel nous accueillent. Le gîte est superbe, luxueux. Hélène étant arrivée épuisée, Michel lui propose de l'emmener un bout de chemin en voiture le lendemain. Il nous emmène visiter des caves de Lauzerte qui ont servi de carrière lors de la construction de la ville. Nous dînons avec nos hôtes, très accueillants et plein d'histoires sur le chemin et les pèlerins. Nous passons une excellente soirée.
Au matin, nous laissons Hélène pour faire les dix premiers kilomètres qui ne sont que montées et descentes. Michel avait bien vu, Hélène aurait vite été épuisée. Parti sous le soleil, nous trouvons la brume dans une vallée, elle nous quitte à Duffort la Capelette où nous retrouvons Hélène. Après un pique-nique au soleil près d'une chapelle, nous marchons ensemble jusqu'à cinq kilomètres de Moissac en échangeant de temps en temps deux par deux. Là, Hélène sentant venir la fatigue, nous interpellons une voiture qui par chance va à Moissac. Le chauffeur la prend en charge et la dépose à la gare où nous la retrouvons une heure après. Hélène a décidé de rentrer à Paris avec Alain et Caroline. Nous nous installons au gîte Ultrëia tenu par Rom, un Irlandais qui après avoir fait le chemin et vécu la maladie de sa femme a décidé de changer de vie. Au cours du repas, les échanges sont riches et profonds.
A 6h15 le lendemain matin, mes trois compagnons embarquent dans un car qui les amène à Agen au TGV de Paris. Après ces quinze jours, je me sens un peu seul. Nos échanges ont été tels que des liens se sont noués et je suis heureux d'avoir pu assister au cheminement intérieur de mes deux compagnons. Je suis aussi heureux d'avoir pu marcher un peu avec Hélène. Cette nouvelle journée est un peu rude du fait de la solitude et du macadam sur une bonne partie du chemin. J'arrive à Flamarens chez Isabelle et Xavier. C'est Nadine qui m'accueille. ce n'est que vers 20h que mes hôtes arrivent. Le repas du soir avec échanges est sympathique et me fait un peu oublier la solitude. Nous nous séparons après la prière familiale pour aller dormir. C'est le lendemain matin juste avant mon départ que j'ai un partage un peu plus profond avec Isabelle. Le chemin est un peu plus court que la veille car les gîtes suivant étant fermés, je m'arrête à Lectoure, ce qui me permet de visiter la cathédrale et la ville qui ont un cachet particulier. Je m'arrête dans un gîte où il n'y a pas de chauffage ni de repas. Je me fait un repas rapide et me couche rapidement. Cela accentue le sentiment de solitude.
Comme le lendemain mon rendez-vous avec mes amis Michèle et Philippe est à 20h à Condom, je fais le détour par La Romieu où je visite l'abbatiale et le cloître sous un beau soleil. Comme je suis arrivé à midi, je m'offre un petit repas dans le petit restaurant Angeline, sur la place du village. L'hôte est très sympathique et me raconte la légende des chats d'Angeline. Quand j'arrive à Condom vers 18h, je file à la cathédrale pour la visiter ainsi que le cloître. Elle est magnifique et mérite elle aussi le détour. En attendant l'heure du rendez-vous je m'abrite dans un café.
Vers 20h15, mes amis arrivent et m'emmènent chez eux. J'y passe deux jours de repos qui me font beaucoup de bien et me permettent de les retrouver. Le dimanche soir ils me ramènent à Condom pour que je reprenne la route demain matin. Ce n'est que dans un petit hôtel que je trouve un gîte, car tout est fermé.

lundi 15 mars 2010

Reprise du chemin

Après trois jours de repos à Montbrison, temps passé entre autre à échanger sur le chemin avec mon amie, j'ai téléphoné pour réserver les trois premiers gîtes. Les hôtes m'ont vivement déconseillé de partir, le chemin est impraticable avec plus de 50cm de neige et des congères, le bord des routes est tout aussi impraticable avec les rejets de chasse-neige. Je suspends donc la reprise en retournant trois semaines à la maison. Ce qui me permet de profiter un peu de mes enfants et petits-enfants car Florian est venu passer quelques jours à la maison avec sa petite famille, et Amandine et Luc ont fêté le premier anniversaire de Gabin.
Le 8 mars, la météo étant un peu plus favorable, je rejoins Le Puy qui est quand même sous la neige. Un petit tour dans la ville et la cathédrale me permet de la découvrir un peu.
Le lendemain une messe à 7h à la cathédrale avec bénédiction de pélerins démarre ce nouveau tronçon. Nous sommes trois à assister à cet office: Alain 64 ans, Caroline 23 ans et moi. Spontanément nous prenons la route ensemble. La montée se fait dans la neige sous un ciel plutôt favorable. Nous cheminerons ainsi jusqu'à St Privat où nous avons retenu au gîte de Jean-Marc et Marie. Nous découvrons un accueil chrétien très chaleureux. Finalement, nous sommes 7 pélerins dans ce gîte. Nous passons une soirée très sympathique. Le lendemain, le temps est couvert avec un peu de neige virevolatant. Nous traverserons des paysages splendides sous le blanc de la neige, mais dans l'ensemble le chemin est praticable. Nous faisons étape au Falzet. Le gîte est normalement fermé, mais les hôtes nous accueillent très gentiment avec un excellent repas. Alain, Caroline et moi avons continué ensemble. Un germain très "teuton" s'est aussi arrêté au même gîte. Nous éviterons de continuer avec lui car son esprit critique est difficilement supportable. Après une bonne nuit, nous repartons sous la neige avec un ciel encore plus bas. La montée sur la chapelle St Roch se fait dans une neige épaisse. Après le col, le ciel se dégage un peu et le paysage change. Nous allons jusqu'à Aumont Aubrac. Nous allons au gîte de la ferme du Barry où nous faisons connaissance d'autres pélerins: Isabelle et Xavier.
Au réveil, le temps semble un peu plus clément. En fait, le soleil arrive peu à peu et la traversée de l'aubrac se fait sous un beau ciel bleu. Nous sommes par contre obligés de suivre un peu la route car la neige a fait de gros congères entre les murs du chemin. Nous cheminons ainsi jusqu'à Nasbinals.
Après une bonne nuit au gîte nous repartons sous le soleil. La montée sur le col de l'Aubrac est superbe avec ses champs de neige. Nous sommes obligés de passer par la route car la neige fait plus de 80cm avec de nombreux congères. Nous passons à Aubrac sous le soleil et la neige soufflée par un vent glacial. nous ne nous y éternisons pas et redescendons par la route jusqu'à Belvezet où nous reprenons le chemin. La neige a disparu et le temps est printannier. A St Chély d'Aubrac, Caroline et Alain décident de s'arrêter. Caroline souffre d'un genoux et Alain est fatigué. Pour ma part, je continue jusqu'à St Côme d'Olt où je suis très gentiment accueilli au couvent de Malet.
Dimanche, tranquillement, je prends la route en flânant dans St Côme, joli petit village médiéval fortifié. En longeant le Lot, j'arrive à Espalion pour la messe de 10h30. Je reprends la route ensuite jusqu'à Estaing puis je monte à Golinhac. Ce tronçon est rude est la journée longue. J'arrive enfin au bout du chemin, mais tout est fermé. J'ai la chance de rencontrer la future gérante du camping qui m'ouvre le gîte du camping. Un repas très frugal: sachet de soupe, pâtes et abricots secs, puis dodo. (mon récit se termine brutalement car je suis à l'office du tourisme de Conques et c'est l'heure de fermeture)