Escale rapide à Port Vila pour changer d’avion et j’arrive à
la tombée de la nuit à Luganville. Un taxi m’attend ainsi qu’une petite famille
qui doit loger comme moi dans la rue de Zaza. Elle nous attend à la descente du
taxi et nous répartit dans les logements. J’ai droit à un pavillon pour moi
tout seul. La petite famille qui est arrivée avec moi et avec qui je partagerai
quelques jours est un médecin militaire de Nouméa, Rémi avec sa femme Déborah
et leurs quatre enfants.
Pendant que Déborah fait manger et couche les enfants,
Zaza nous emmène Rémi et moi au nakamal voisin pour sacrifier à la tradition du
kava mais surtout nous donner les info et mettre au point les jours à venir. Le
nakamal est un bar un peu spécial, très sombre, avec des lumières tamisées car
la lumière forte fait mal aux yeux des buveurs de kava.
Le kava est une boisson
tirée du jus des racines du poivrier sauvage. C’est une boisson qui a un goût
de terre, qui est deg…. , qui ankylose la langue et la bouche, comme le produit
pour endormir du dentiste. Les buveurs de kava en boivent plusieurs de suite et
se trouvent dans un état second qui leur permet de dormir en oubliant les
soucis. Traditionnellement, on dit : « malok » et on avale
cul-sec le schell (un petit bol en demi noix de coco). Il vaut mieux avaler
cul-sec, on sent moins le goût. On peut ensuite se rincer tout de suite la
bouche à l’eau, il y a des robinets avec une rigole en-dessous qui permet de
cracher. Nous mettons au point avec Zaza les modalités du séjour sur l’île, ce
qui lui permet de passer rapidement quelques coups de téléphone pour que tout
coule sans accros. Pour ma part, elle m’a concocté un bon petit programme très
sympa dans la suite du séjour à Tanna.
Le lendemain, elle nous met Rémi et moi entre les mains de
Malcom un Australien, ancien scaphandrier, qui a un club de plongée. Il nous
amène au bateau et nous confie à l’un de ses moniteurs local qui se révèlera
très professionnel. Il faut avouer que j’avais très envie de faire les deux
plongées mythiques du Vanuatu mais comme j’ai passé mon niveau un en 2011, que
je n’ai pas replongé depuis et que je n’ai que huit plongées, je ne suis pas
très à l’aise. J’ai la chance de plonger avec Rémi qui a son niveau trois, qui
est médecin sportif qualifié plongée, et avec un moniteur pour moi tout seul.
Je me sens donc un peu plus en confiance. Pendant toute la durée des deux
plongées que nous ferons, Simon, le moniteur ne me lâchera pas et me guidera.
Cela me permet donc de bien profiter des moments. Je regrette de ne pas avoir
d’appareil étanche car cela vaut vraiment le coup.
La première plongée se fait sur le Coolidge. C’est un bateau
de croisière américain, comme le France, qui au cours de la deuxième guerre
mondiale a été transformé en transport de troupes. Lors d’une rotation entre la
Nouvelle Calédonie et San Francisco, il a fait escale à Luganville et a sauté
sur une de leurs mines. Le capitaine a fait échouer le navire pour permettre au
passagers de se sauver, il n’y a eu que deux morts. Après l’abandon du navire,
celui-ci s’est couché, puis a peu à peu a glissé sur le récif et coulé entre 20
et 70 m de profondeur. Tout est resté à l’intérieur et les plongeurs se
régalent en venant visiter les ponts, les cales, les coursives, les salons et
les suites de la première classe. Au cours de cette plongée, nous parcourons le
pont avant où nous voyons les canons, les obus dans les casiers, les douilles
éparpillées sur le pont, les fusils et divers autres matériels dont une marmite
de cuisine avec à l’intérieur des assiettes et de la vaisselle.
Dans la cale,
les véhicules sont renversés, on y voit des jeeps, des chars, des camions….
La deuxième plongée devait permettre d’aller plus loin dans
le bateau, mais comme je ne reste pas suffisamment car je consomme trop vite,
nous faisons la deuxième plongée sur Million Dollars Point. C’est un point de
la côte où les américains ont jeté à la mer tous les matériels qu’ils n’ont pas
voulu remmener en Amérique et qu’il ne voulaient pas que le japonais
récupèrent. Il ont jeté là des dizaines de véhicules : jeeps, camions,
bulldozers, chariots élévateurs, etc… ,
ainsi que deux barges. Ils ont mis ensuite des explosifs et ont tout fait
sauter. Comme c’est tout au bord de la plage, certains débris la jonchent
d’ailleurs encore, on part directement du bord de l’eau et on s’enfonce pour
voir entre dix et trente mètres tous ce matériels abandonnés représentant plusieurs
millions de dollars, d’où le nom du spot. C’est impressionnant ! Les
véhicules sont entiers avec leurs pneus ou leurs chenilles. Me sentant en
confiance, je profite bien du spectacle qui est unique.
Le lendemain, je rejoins Daniel, Patricia, Logan leur fils
et sa copine pour la sortie à Millenium Cave. C’est un site perdu dans la brousse
géré par un village nivane. Au cours du trajet, nous empruntons une belle piste
bien plane, très large et bien droite, anciennement goudronnée dont les bords
goudronnés se perdent dans la végétation. Le chauffeur de taxi nous dit que c’est
l’ancien aérodrome construit par les américains pendant la guerre pour leurs
bombardiers.
Notre chauffeur nous amène jusqu’à un village où nous laissons le
véhicule, puis à pied, à travers la brousse, il nous conduit au village de Vunaspef.
Sala qui sera l’un de nos guides nous accueille.
Nous déposons nos sacs et équipés
de vêtements et de chaussures qui ne craignent pas l’eau, nous le suivons à
travers la brousse. Serge le deuxième guide ferme la marche et porte un sac
étanche.
La piste monte et descend, tantôt creusée de marches dans la terre,
tantôt équipée d’échelles rudimentaires mais solides. Nous arrivons au fond du
lit d’un ruisseau qui s’enfonce dans la terre.
Nous le suivons et découvrons la
Millenium Cave, une caverne traversante de plus de 400m de long, de 3 à 8 m de
large et de 15 à 50 m de haut. Elle est occupée par des milliers d’hirondelles
qui ont fait leurs nids dans les trous du rocher et par des chauve-souris. Les
anciens connaissaient cette grotte pour venir y chasser les hirondelles, mais
ils n’avaient jamais été au fond. C’est Serge, qui un jour qu’il péchait la
crevette dans un torrent est entré dans une grotte se demandant ce qu’il allait
trouver et il a débouché de la grotte connue. Pendant longtemps, elle n’était
connue que d’eux. C’est en 2000 qu’ils ont équipé et lancé le circuit. D’où le
nom : millenium. Les bénéfices reviennent au village pour construire et
faire tourner l’école et le jardin d’enfants. Nous suivons donc le cours du
ruisseau avec de l’eau de la cheville au genou et débouchons de l’autre côté du
massif dans un torrent surplombé de falaises.
Après un casse-croûte nous suivons le torrent, tantôt
escaladant des rochers, tantôt se laissant couler dans le cours d’eau pour
ensuite suivre à la nage un canyon de plusieurs mètres de haut .
C’est
magnifique ! L’eau est d’une pureté, d’une transparence que l’on voit
facilement le fond à plusieurs mètres et les poissons qui nagent autour de
nous.
Par un sentier du même type que précédemment, nous remontons au village.
Cette balade n’est pas difficile, mais assez physique et certains éprouvent le
besoin d’aller dormir. Nous restons la nuit ici pour partager un peu la vie du
village.
Sala nous conduit voir une femme qui prépare le lap lap, plat
traditionnel à base de légumes, ignames et poulet, qui est cuit dans des
feuilles de bananier sur des braises et couvert par des pierres chauffées dans
les braises.
Puis je vais faire un tour dans les jardins. Comme ils ne
vivent que de leurs récoltes, leurs jardins sont immenses. Il n’y a pas comme
chez nous des carrés de ceci ou de cela, tout pousse ensemble, ils forment des
lignes de plantation, mais on trouve mélangés, du maïs, des ignames, des ananas,
des tas d’autres légumes au milieu de plants de cacahuètes. Sala me présente un
peu son jardin puis au retour au village, avec ses confrères, ils se mettent à
préparer le cava.
Quand on voit la boisson, ce n’est pas très engageant, mais
quand on voit comment ils le font, cela donne encore moins envie d’en boire. On
se demande d’ailleurs comment on ne tombe pas malade en buvant ça. C’est
peut-être antiseptique après tout.
Les racines sont déjà épluchées et coupées en tout petits
carrés. Ils utilisent un vieux hachoir à viande pour broyer les racines. Ils
commencent par donner quelques tours pour sortir ce qui reste de la veille puis
on commence à broyer. Comme c’est du bois, cela résiste et chacun notre tour on
s’amuse à tourner la manivelle. C’est tellement dur que les hachoirs ne durent
pas une éternité, il y a autour quelques cadavres bien usés.
Il en sort une
pâte grise qu’il mettent ensuite dans un vieux sac de jute et ils lavent abondamment
l’extrait pour en tirer la substance voulue. Cela donne un jus gris qu’ils
tamisent ensuite avec un vieux chiffon et le cava est prêt à boire…..
Nous rejoignons ensuite la salle commune où un repas nous a
été préparé. René le deuxième fils du chef du village nous fait offrir un collier
de bienvenue par des enfants et nous fait un petit discours avant de partager
…. Le cava… bien sûr ! Puis nous passons à table pour déguster un
succulent repas traditionnel. Je ne me souviens pas de tout ce qui nous a été
servi, mais nous nous sommes régalés. Il y avait une salade de papaye verte,
c’est comme du concombre, une salade de fougère, un régal, le lap lap bien sûr,
extra et plusieurs autres plats dont des crevettes de la rivière. Les
villageois ont attendu que nous ayons fini pour manger à leur tour. Pendant le
repas, René répond gentiment à nos questions sur la vie au village.
Nous
rejoignons ensuite le bungalow où nous sommes installés pour dormir. C’est une
paillotte sur pilotis comme celles des villageois avec un toit de feuilles de
bananiers et des murs en roseaux tressés.
Le lendemain matin, aux aurores, je me lève car je repars
pour l’étape suivante. Un villageois me reconduit jusqu’au village suivant où
je retrouve le taxi qui est venu me chercher et qui me dépose devant chez Zaza.
Je prends juste le nécessaire dans mes affaires et un autre taxi m’emmène à Port
Olry. Ah ! Port Olry, un vrai avant goût du paradis.
Mais avant, en cours
de route, on fait une halte au bord d’un « trou bleu ». Il y a comme
cela sur l’île, plusieurs « trou bleu ». Ce sont des trous d’eau
douce qui communiquent avec la mer et dont le niveau varie en fonction des
marées. On les appelle « bleu » parce qu’ils sont d’un bleu irréel. Le
bleu de la photo est le bleu réel. A se demander s’il n’y a pas du colorant
dedans. Mais l’eau est si belle, si pure que l’on voit le fond à près de quinze
mètres.
On fait un petit tour à Port Champagne une très belle plage comme sur
les cartes postales mais qui est envahie par les passagers d’un bateau de
croisière Australien qui a jeté l’ancre dans la baie. Les autochtones en ont
profité pour dresser leurs petits étalages pour essayer de vendre quelques
souvenirs, et il semble que ça marche.
Début d’après-midi, j’arrive à Port Olry.
C’est un petit village de pécheurs très tranquille avec quelques bungalows
construits au bord de la plage.
Une plage de sable extrêmement fin, blanc,
propre, une eau bleu aux tons multiples, des cocotiers penchant la tête et des
arbres multiséculaires. Le rêve !
Mon bungalow est à l’ombre d’un beau tamanou
d’au moins cinq cents ans, séparé de la plage par une pelouse de vingt mètres.
Soir et matin, il est doux de commencer et de terminer la journée par une
baignade dans une eau à température idéale.
Maurice, mon hôte, me prête
gentiment palmes, masque et tuba pour admirer les fonds marins. En fin
d’après-midi, je retrouve Rémi et Déborah qui sont là depuis deux jours. Le
soir, je m’offre un crabe de cocotier pour goûter.
Le lendemain, dimanche matin, je vais à la messe au village.
Comme à Port Vila, la messe est tantôt en français, tantôt en bichlama, mais
les chants sont magnifiques et la messe très priante et recueillie.
Puis
Florian et son épouse, autres vacanciers comme nous, militaire de Nouvelle
Calédonie aussi, ont organisé avec leur hôte, une journée barbecue au bord d’une
autre plage. Rémi et Déborah sont de la partie et ils m’invitent à les
rejoindre, ce que j’accepte bien sûr. Journée sympa, farniente, exploration des
fonds marins, et d’une île sauvage devant la baie où nous sommes. Il y a
paraît-il un tunnel sous-marin qui traverse l’île de part en part et qui est
plein de langoustes.
Le soir, le restaurant nous a préparé un petit porcelet
cuit au four, extra !
Là se termine cette parenthèse au Vanuatu car le lendemain
lundi, je reprends l’avion pour Port Vila où j’attrape celui pour Brisbane en
Australie.
En conclusion de cette expérience, je peux dire que le Vanuatu est un pays qui mérite à être connu, bien qu'il soit très pauvre, il a des trésors cachés. C'est très beau, nettement moins cher que la Nouvelle Zélande et l'Australie, mais surtout, les nivanes sont des gens très accueillants, paisibles et toujours souriants.
Album d'Espiritu Santo:
https://goo.gl/photos/FNH6K8JxtBjXHQZ88